MAHABALIPURAM, ENTRE MADRAS ET PONDICHERRY

MARDI 16 SEPTEMBRE

Nous voila au sud de l'Inde, a Mahabalipuram, face a la baie du Bengale, pres de la mer.

Et oui, nous avons quitte Calcutta.
Ou plutot, nous avons fuit Calcutta.
Calcutta la chaotique, miserable, bruyante, puante et polluee.
Fatigues par nos trois mois a se deplacer a longueur de temps (un peu trop peut etre), nous avons pris de plein fouet "la claque".
Celle que certains voyageurs prennent en venant en Inde. Certains arrivent a surpasser et a continuer leur voyage dans ce pays, ce sera difficile pour nous...

Nous avons erre quelques heures dans la ville, essayant en vain d'acheter un billet de train a la gare d'Howrah.
Gare qui voit chaque jour defiler des millions de voyageurs. Bordelique, sale...
Trop complique d'y acheter un billet (il faut connaitre le numero du train, son nom et inscrire le tout sur un formulaire pour aller faire la queue au guichet de reservation), nous decidons de passer par une agence de Sudder street, rue touristique de Calcutta.

Nous retournons prendre le ferry pour traverser le fleuve.
Derriere nous, un homme se tient debout. Il est vetu d'une tunique leopard orange et rouge, le visage couvert d'une pate blanche, de grosses dreadlocks et un baton sacre avec au bout un tambour.
On ne sait pas si on a le droit de le regarder, on ne sait pas quel est son role dans la societe, nous ne savons rien de lui et nous ne savons rien de l'Inde, des castes, de la religion, trop peu des coutumes...
Nous avons un manque de connaissance sur ce pays.

Un pays difficile a connaitre dans son integralite tant il y a de diversite de cultures, de coutumes, de religions...tant ce pays est immense et varie.

Nous n'avons pas forcement choisi la meilleure ville pour arriver.
Calcutta grouille de ses 14 millions d'habitants, elle vous prend le nez avec ses odeurs d'ordures, de pots d'echappements, de pisse et de merde...
Elle vous prend au coeur avec tous ses enfants, sales, pauvres et abimes par la vie...
Des milliers de personnes vous regardent constamment parce que vous etes blancs, parce que vous n'etes pas habilles comme il faut, parce qu'ici une femme n'a pas l'air d'avoir le droit de fumer...
Et tous, par leurs regards, ont l'air de nous poser la meme question :
"Que faites vous la ?"

Nous allons voir le Victoria Memorial, monument imposant au sein d'un parc verdoyant, ou a l'interieur sont exposes des dessins, des peintures, des textes et des objets relatant l'histoire de la ville...
Moment de "detente", une heure durant laquelle nous ne sommes pas sollicites, si ce n'est par les gardes qui ferment le batiment...

Les parcs autour abritent les amoureux de Calcutta.
Non, ici les amoureux ne sont pas sur des bancs publics, ils sont caches entre un parapluie et un buisson.
Se tenir la main et en tout cas montrer de l'affection en public en Inde est plutot mal vu...
Difficile egalement pour nous de faire face a toute cette misere sans pouvoir se reconforter, ne serait-ce qu'en se serrant fort la main...
Difficile pour Cath de ne pas pouvoir fumer sans etre fusillee du regard...

Nous decidons donc de prendre un train pour Chennai (Madras), d'ou nous rejoindrons Mahabalipuram, village de 12.000 habitants seulement, donc surement plus calme, plus abordable.
Peut etre notre possibilite de s'acclimater a l'Inde ?

Nous quittons donc notre guesthouse, au 5eme etage d'un vieil immeuble de Calcutta.
Nous prenons une derniere fois ce vieil ascenseur des annees 40...
Direction le taxi, la gare, la foule, l'attente.

Apres deux heures d'attente sur le quai de la gare (ou il est interdit de prendre des photos, de filmer ou de fumer...), le train arrive.
Les policiers s'enervent et les voyageurs les plus pauvres egalement. Tous veulent avoir la meilleure place dans ces wagons ou ils s'entassent a une centaine peut etre.
Ils doivent faire la queue. Celui qui deborde ou qui essaie de depasser se fait immediatement taper dessus (avec un baton en bambou) par un gros flic moustachu qui n'a pas l'air commode du tout.

Nous nous installons a nos places, nous sommes normalement separes, Cath a l'extremite du wagon et Tom au milieu...
Pas possible, nous voyageons ensemble. L'homme qui avait la place a cote de Cath voudra bien changer avec Tom.
Soudain, un chien et plusieurs policiers en civil debarquent, l'un deux avec un "detecteur de bombes"...ils sont accompagnes de trois photographes qui nous prennent en photos.
Totalement surpris, on doit avoir une sacree tete sur les photos..
Il faut dire que les flics et l'armee sont sur les dents apres les attentas de Dehli ce week end. 23 morts apres une serie d'explosions dans des quartiers commerciaux ou les filles de Dehli viennent acheter des jeans et des debardeurs...

Tom decide d'aller fumer une clope entre les deux quais, sur la route, 15min avant le depart du train.
Mauvaise idee. Les flics en civil lui tombent dessus et lui disent que c'est totalement interdit de fumer ici...
"Ah bon, je ne savais pas..."
Ils n'ont pas l'air de plaisanter, 250 roupies d'amende (5 euros).
"Je dois aller chercher l'argent dans le train."
Tom previent Cath qui commence a etre habituee apres la Chine...
Il rejoint les flics qui lui disent de venir payer son amende. Mais le train va bientot partir.
Les flics lui demandent alors d'ou il vient et ce qu'il fait la.
"France. Tourist"
Ils font signe a Tom de degager sans meme payer l'amende. On ne comprend pas trop mais bon...tant mieux.

30 heures de train, sur une banquette de 2 metres sur 80 cm.
On fume dans les toilettes qui puent, on mange du poulet curry, on lit le guide et on pense, on reflechit...
On traverse des paysages magnifiques, de grandes etendues verdoyantes et cultivees, d'autres plus arides, des montagnes, des fleuves, des villes deguelasses et des habitations miserables...

Arrives a Chennai, juste avant la tombee de la nuit, nous decidons de prendre un taxi plutot que le bus, surement bonde a cette heure la. Que valent nos sacs face a deux travailleurs ou deux mendiants ?

On se pose a Lakshmi Lodge.
Repas dans un petit resto.
Nous allons nous coucher, epuises.

Ce matin, petit tour sur la plage, les pecheurs rentrent de leur nuit de travail.
Visite du Talasayana Perumai Temple, temple ou au fond d'un couloir sombre, un homme nous appelle.
"Come, come..."
Au fond, une bougie eclaire une statue de Krishna, on nous met de la poudre rouge sur le front, on nous passe une sorte de cloche sur la tete et on nous offre un collier de fleurs de jasmin...

Nous ressortons et nous promenons un peu autour.
Cette ville est beaucoup plus calme (14 millions d'habitants en moins) et les gens ici nous disent bonjour et nous sourient. Malheureusement c'est pour nous vendre des bijoux, des vetements ou a manger...
Comme c'est un endroit un peu touristique, il y a bien sur des mendiants... On commence a fatiguer et tout se melange dans notre tete...
Les gens nous regardent encore de la meme facon, ayant l'air de nous poser toujours cette meme question :
"Que faites vous la ?"
C'est vrai, que fait-on la ?
Visiter l'Inde, etre des touristes, des voyeurs de la misere du monde... Cela ne nous convient pas et nous le ressentons au fond de nous meme...
Petit dej dans un cafe et nous prenons notre decision.
Si nous revenons en Inde, ce sera pour se rendre utile aupres de la population...

Apres demain nous vous ecrirons d'ailleurs.